Fontecchio valait bien le détour, mais quel détour ! J’ai rarement dans ma jeune carrière d’autostoppeur (250 voitures à mon actif) éprouvé de telles émotions. Lundi midi, Gaspard, le père de mon ami Charles qui m’a déjà si gentiment hébergé pendant 2 jours me dépose dans le centre de Tivoli après une très belle visite de la Villa d’Hadrien.
Le soleil brille, j’ai 6 heures pour réaliser 120km, un trajet prévu en 1h30 par le GPS, de quoi passer une après midi détendu. Une fois la ville visitée en un coup de vent, je me dirige vers les abords de cette dernière. En 120 secondes je trouve un Pakistanais, me déposant quelques kilomètres plus loin, c’est toujours ça de pris ! Et puis…
10 minutes, 20 minutes, 30 minutes, 40 minutes … Toujours rien. Je n’ai encore jamais attendu aussi longtemps lors de mon périple. Ai-je bien faits de découvrir la ville plutôt que de commencer l’autostop dès que je le pouvais ? Je trouverai mon salut au bout de 50 minutes, pour finalement avancer de 8 km… Au moins le conducteur m’a déposé à une entrée d’autoroute.
J’aime bien les entrées d’autoroute et les péages ! On tombe généralement sur des gens qui font des grandes distances et comme ma destination est à côté de la plus grande ville à l’est, j’ai bon espoir. De plus je suis situé en sortie d’un rond point, les voitures ne vont pas très vite et comme elle doivent s’arrêter pour prendre leur ticket de péage, l’endroit est idéal ! Une, deux et trois voitures s’arrêtent, mais elles vont toutes vers Rome, dans l’autre direction. Me disant qu’il y en aura bien une pour aller à L’Aquila, je continue lorsque soudain surgit une voiture de police, girophare en alerte.
Les carabinieris débarquent, me bloquent la route et après m’avoir demandé mon nom, ils me font signe de monter dans leur voiture. Que vont-ils me faire ? Je n’ai rien fait de trop illégal non ? Une fois arrivés à leur caserne, ils relèvent mes documents d’identité et m’insultent de fous et d’inconscient. En leur expliquant que je fais un grand voyage en autostop, que c’est pour moi un challenge et que j’ai déjà réussi à venir du Nord Est de la France en stop, ils me laissent repartir non sans mépris de ce jeune français qui semble exploiter la gentillesse de ces braves italiens.
Mais c’est que le temps presse, il est 15h et je suis encore à 3h de la destination, l’itinéraire est près de 3 fois plus long si je ne prends pas l’autoroute. Vais-je encore dormir sous la tente ? J’aperçois les cimes enneigées et je me dis qu’il me faudrait un petit miracle pour me sortir de là.
Les voitures s’enchaînent, l’espoir renaît même si la distance à effectuer est encore considérable. Mon salut viendra d’un italo-albanais qui a tout de suite adoré mon projet car ma prochaine destination n’est rien d’autre que l’Albanie. Après m’avoir offert le café et des douceurs, mon conducteur effectuera le détour nécessaire pour me permettre d’arriver à 19h dans une nuit noir à Fontecchio.
Dans ce petit village de 300 habitants, perdu dans la chaîne de montagne des Abruzzes cohabitent différents personnages que je vais me faire une joie de vous dépeindre, tant chacun est si étonnant, si hors du temps.
D’abord il y a la maire du village, Sabrina qui parle un parfait français. Elle s’est fait une joie de m’accueillir avec des produits locaux. Femme d’une cinquantaine d’année, elle dirige la commune depuis 13 ans et a souhaité en faire un refuge pour les artistes du monde. À ce titre on trouve à Fontecchio pas moins de 30 artistes, d’une dizaine de nationalités différentes. Femme humaniste, elle se dévoue complètement pour le rayonnement culturel de sa ville.
À Fontecchio il y a également les anciens du village, c’est eux qui m’ont hébergé le premier soir. Ils m’ont accueilli dans un petit cabanon chauffé au feu de bois, où il faisait cuire quelques saucisses et une casserole de pâtes. Ils étaient d’une gaieté extraordinaire faisant chaud au cœur. Angelo jouait de l’accordéon pendant que Domenico poussait la chansonnette, et Frederico surveillait les pâtes. Pendant ce temps, je me réchauffais au coin du feu, bien heureux d’avoir un toit sur la tête. Il faudra noter que chacune de leur femme me préparera un petit panier repas pour mon départ, de quoi avoir 2 jours de provisions sur le dos !
J’ai aussi eu le plaisir de rencontrer Luca, le chef de bande des artistes. Il s’est installé à Fontecchio pour y créer son potager et vivre de manière indépendante, hors de la société. Nos discussions sur l’évolution du monde et sur les perspectives dont chacun devait aspirer pour son futur et combler son bonheur furent extrêmement enrichissantes. Luca m’a fait visiter la vieille ville, les alentours avant de m’emmener dîner en ville avec ces amis.
Enfin, comment ne pas les mentionner ? Fontecchio est également la commune de 30 bambinos, de 3 à 12 ans. En accord avec Sabrina qui me servait d’interprète, j’ai pu aller me présenter aux enfants, répondre à leurs questions et surtout essayer de leur transmettre les valeurs de l’autostop qui me sont chères ; patience, bienveillance, tolérance et soif d’apprendre des autres ! Il fallait voir les yeux émerveillés des petits bouts lorsque je pointais les différents pays de mon parcours sur la grande carte, où alors les sourires de chacun des enfants qui ont voulu me prendre leur bras. Comme le dis si bien Antoine de Saint-Exupéry, le rêve des plus petits n’a pas de prix !
Très joli récit conté par Lucas Venner ,
Un rêveur d’avenir et aventurier de rencontres humaines sans frontière et sans tabou.
Forza Lucas
Allez Lucas, tu portes Haut les couleurs de Liverdun!
Les gens de Fontecchio te regardent avec passion et envie